vendredi 17 février 2012

Viand'dévore

Viand'dévore

J'adore la viande, je dévore le viande, je suis un... carnivore.
Mais pourquoi parle-t'on si souvent de la viande comme d'une des causes du réchauffement climatique?

En moyenne, le belge consomme 120 grammes de viande par jour (voire même 270 selon une récente étude de l'Observatoire Bruxellois de la Consommation Durable (OBCD)) dont
  • 46% de viande porcine
  • 23% de volaille
  • 20% de viande bovine
  • 5% de gibier, lapin et cheval
  • 2% de viande ovine et caprine
Cela représente 420€ annuel par personne d'achat de viande fraiche (plus de 800€ d'après l'OBCD), congelée ou en charcuterie. Sur la durée de vie d'un belge moyen, chacun de nous a donc ingurgité au moins:
  • 5 vaches
  • 7 moutons
  • 42 cochons
  • 891 poulets
  • 43 dindes
  • 23 lapins
Si vous voulez voir cela avec des petits dessins très didactiques, "Love Meat Ender" est un documentaire belge, primé, de Manu Coeman, réalisé pour la RTBF. Tout public (avec toutefois quelques scènes un peu plus dures), il nous montre comment notre société est passée en un demi-siècle d'une approche où la viande était un bien précieux et considéré comme tel à une telle boulimie viandeuse. Et surtout, il nous montre, non sans humour, les aboutissants de la (sur)consommation actuelle.

L'impact carbone
Le Dr. Pachauri, président du GIEC, le clamait déjà en 2009 en s'appuyant sur des données 2006 de la Food and Agriculture Organization (FAO) des Nations-Unies: l'élevage intensif du bétail représente 80% des émissions en gaz à effet de serre de l'agriculture planétaire, et donc 18% des émissions engendrées par l'ensemble des activités humaines. Enorme! Et pourtant ce n'est pas tout car de nombreux produits à base de viande sont mis sur le marché sous forme congelée (dépense d'énergie supplémentaire), nécessitent d'être cuits un certain temps à très haute température (re-énergie), quand ils ne sont pas tout simplement gaspillés.

Mais le pire est sans doute à venir car les nations émergentes souhaitent atteindre le standing des pays occidentaux, et donc rêvent de pouvoir se payer de la viande. Un bon burger fait partie des "signes extérieurs de richesse" que de nombreux peuples à l'alimentation aujourd'hui plus simple et variée souhaitent pouvoir afficher.



Les autres impacts environnementaux
A côte de cela, le boeuf, pour toujours parler de lui puisqu'il est le plus polluant des sources de viande, a également d'autres impacts: un kilo de boeuf a nécessité 15.500 litres d'eau avant d'arriver dans notre assiette. Oui, oui: quinze mille cinq cents!

En comparaison, un kilo de porc ne requiert que 4900 litres d'eau virtuelle, un kilo de poulet 3900 litres, et un kilo de riz 3000 litres. La viande entraîne donc aussi une diminution des réserves en eau (dont le prix va continuer d'augmenter), et différentes formes de pollution des nappes phréatiques.

De plus, sous la demande croissante de viande, il faut aggrandir sans cesse les zones de paturâges, en déboisant des forêts ou en empiétant sur d'autres écosystèmes. Les pertes de biodiversité ne cessent d'augmenter en Amazonie et en Afrique sub-saharienne. Et même l'élevage industriel qui garde les bovins dans un territoire très confiné n'enraie pas ce phénomène car il faut bien trouver un endroit pour cultiver le soja qui les nourrit. Outre la dégradation de la nature (la quantité de nitrates rejetée par l'élevage intensif est telle que la pollution atteint aujourd'hui la mer où des espèces d'algue prolifèrent en masse), l'impact social sur les populations locales est également assez prononcé.

Santé
D'un point de vue santé, une étude publiée en 2010 dans les Archives of Internal Medecine a observé pendant 10 ans un demi-million de personnes et noté une mortalité supérieure de 11% chez les hommes et 21% chez les femmes grands consommateurs de viande rouge. Cancer, diabète, obésité sont donc bien plus probable en cas d'excès de protéines animales.

Alors, que faire?
Pas besoin de devenir végétarien du jour au lendemain, limiter les excès est déjà un pas important. Réduire sa consommation de viande rouge, et petit à petit la remplacer par de la viande blanche a un impact immédiat pour la planète, et sans doute aussi pour les artères. Alors cet été, brochettes de poulet au barbecue? En effet, un bœuf est un producteur de viande bien moins efficace qu’un porc ou un poulet.  Ces derniers transforment efficacement les grains de leur leur nourriture en viande tout en ne produisant que peu de méthane, ou pas du tout. Cela permet de maintenir leur coût environnemental à un niveau faible.
Transformée en équivalent CO2, les consommations affichées plus haut donnent à ceci:

Et on se rend dès lors compte que chaque fois que 100gr de boeuf sont remplacés dans notre assiette par 100gr de poulet, c'est 2 kilos de CO2 qui ne sont pas émis!

Pour aller plus loin, il est possible de remplacer petit à petit de la viande par des mélanges de légumineuses et de céréales qui, consommées ensemble, apportent un équivalent protéiné à l'organisme. Objectif pour l'été 2013: barbecue de courgettes accompagnées de humus de pois chiches avec du pain complet?

Pour s'entraîner, suivez le guide: http://www.unjoursansviande.be. Une fois qu'on a (re)pris goût à des recettes simples, goutues et végétales, on se demande comment on a pû ignorer cette palette de saveurs aussi longtemps. Et gardons le steak pour les grandes occasions.

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Pour en savoir plus, quelques lectures, et vidéos, avec des approches très diverses:
  • Un article du New Scientist repris dans courrier international, avec encore plus de chiffres.
  • "Faut-il manger les animaux?" de Jonathan Safran Foer s'interroge sur la suprématie auto-proclamée de l'homme sur le règne animal et pointe une incohérence qui ne manque pas de piquant: comment concilions-nous lea démarche sentimentale, quasi à genoux, devant certains animaux de compagnie avec la manière brutale et sans pitié avec laquelle nous traitons les animaux d'élevage industriel qui servent à nous nourrir...
  • "Rundskop", le film du belge Michaël Roskam nominé aux oscars 2012 pour son intrigue dans le milieu des hormones. Vous allez voir, on va parler de la viande jusqu'à Hollywood!